En combinant chimie raisonnée et simulation numérique, une équipe dirigée par Gérard Ferey de l'Institut Lavoisier (CNRS/Université de Versailles) vient de mettre au point un nouveau matériau nanoporeux, le téréphtalate de chrome, dont les performances dépassent de loin celles des meilleurs matériaux connus jusqu'à présent. Avec des pores de 2.9 et 3.4 nanomètres de diamètre et une surface spécifique adsorbante de 6 000 mètres carrés par gramme, ce solide, décrit dans la revue Science, se révèle aussi être le meilleur matériau pour le stockage de l'hydrogène.
Les nanomatériaux poreux sont des matériaux dont la taille des pores flirte avec le nanomètre (le millionième de milllimètre), une échelle immédiatement supérieure à celle des atomes. Un millier d'atomes peuvent être contenus dans une sphère de 2 à 3 nanomètres. Un gramme de nanomatériaux poreux, déplié, représente une surface de plusieurs centaines à plusieurs milliers de mètres carrés.
Des nanoréservoirs
Ces nanomatériaux aux propriétés adsorbantes (adhésion et fixation à la surface) sont capables de piéger, capturer un certain nombre de substances ou de molécules. Ils peuvent notamment séparer ou stocker des gaz comme l'hydrogène (utiles pour les piles à combustible), le méthane ou le gaz carbonique, mais aussi permettre une extraction ou un piégeage sélectif de solvants. Ces solides poreux deviennent alors des matériaux stratégiques en terme d'énergie et de développement durable.
L'enjeu est d'obtenir des pores suffisamment larges (2 à 3 nm) et des surfaces spécifiques élevées pour qu'une grande quantité de ces molécules puisse y être stockée, pour une meilleure efficacité.
Une équipe dirigée par Gérard Ferey de l'Institut Lavoisier (CNRS / Université de Versailles) vient de décrire le téréphtalate de chrome ou MIL-101 (Matériaux de l'Institut Lavoisier n°101), un solide cristallisé dont les performances dépassent de très loin celles des meilleurs matériaux connus jusqu'à présent. Sa maille, d'un volume de plus de 700 000 angströms (10-10) avoisine celle des protéines. Ce nanomatériau possède deux types de pores de diamètres accessibles de respectivement 2.9 et 3.4 nm et une surface spécifique de près de 6 000 mètres carrés par gramme, ce qui laisse loin derrière le précédent record de 4 500 mètres carrés par gramme détenu par une équipe américaine. Ces pores peuvent accueillir en quantité importante des espèces moléculaires volumineuses, comme des ions de Keggin d'un diamètre de plus de 1nm qui sont d'excellents catalyseurs, mais aussi des médicaments comme l'ibuprofène. Le MIL-101 se révèle d'autre part être le meilleur matériau actuel pour le stockage d'hydrogène.
En plus de ses capacités en tant que nanoréservoir, les chercheurs ont montré son potentiel pour devenir un nanoréacteur. Ils ont pu en effet synthétiser in situ à cette échelle des nanoparticules de sulfure de zinc, c'est-à-dire un semi-conducteur. Ces travaux ouvrent des perspectives intéressantes pour les nanomatériaux. Les pores pourraient servir de moule et permettraient d'étudier la nanophysique de ce type de solides.
Au-delà des performances elles-mêmes, la méthode d'accès à la structure, combinant chimie raisonnée et simulation numérique, est originale puisque celle-ci peut-être prédite une fois que les conditions chimiques correspondant à l'existence de la partie inorganique sont maîtrisées.
Source : techno-science.net
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