Les projets de biocarburants belges poussent comme des champignons. Car l'Union européenne et l'État belge incitent fiscalement leur intégration dans notre essence pour en garantir le développement. Et ainsi assurer la viabilité du marché.
Le marché naissant des biocarburants s'agite : ses acteurs potentiels sont dans les starting-blocks pour produire du carburant vert. En Wallonie, les Raffineries tirlemontoises, propriété du groupe allemand Südzucker AG, ont annoncé € 245 millions d'investissements dans une usine (Biowanze) pour la production de bioéthanol. A Gand, Alco Bio Fuel est prête à y consacrer € 120 millions et 4BioFuels, à Bruxelles, voudrait engager € 35 millions dans l'éthanol également. D'autres ont préféré le biodiesel. Comme Neochim à Feluy ou BioFuel S.A. près de Liège.
C'est que la Belgique, après d'autres pays européens, adapte une directive européenne qui prévoit l'intégration, d'ici 2010, de 5,75 % de carburant vert dans les carburants fossiles, afin de réduire l'émission des gaz à effet de serre.
Il existe deux types de biocarburants : le biodiesel, obtenu à partir d'huile végétale (colza, etc.) ou animale transformée par un procédé chimique, et le bioéthanol issu de la fermentation de sucres (betteraves, céréales, etc.). Ces deux substances peuvent être intégrées au carburant traditionnel sans adaptation des véhicules, pour autant que leur dose soit modérée.
Chez nous, les quotas de production sont déterminés : 250.000 m³ tant pour l'éthanol que pour le biodiesel, dans un premier temps (380.000 m³ par la suite). Un marché que les spécialistes estiment à plus de € 300 millions pour le biodiesel, et à la moitié environ pour le bioéthanol, et qui devrait croître à l'avenir. «On pourrait monter bien au-delà des 5,75 % préconisés par l'Union européenne, estime Guy De Mol, administrateur délégué de BioFuel S.A. On est devant un marché abyssal.»
Défiscalisation bienfaitrice
Pourtant, le coût de production des biocarburants est très élevé et paraît peu enclin à concurrencer les carburants traditionnels. «Il n'existe encore aucun biocarburant compétitif face à l'essence, reconnaît Giorgio Spinelli, managing director de Neochim. A l'heure actuelle, le biodiesel coûte € 900/tonne à la production, contre € 500/tonne pour du diesel classique.» Comment, dès lors, convaincre les pétroliers de les intégrer à leur essence ? Et comment espérer que les unités de production belges soient rentables ?
Grâce à un programme de défiscalisation des biocarburants adopté par le gouvernement pour une durée maximum de six ans. Ce qui signifie la suppression des accises sur la proportion de biocarburant ajouté à l'essence et l'ajustement vers le haut des accises sur la partie fossile du carburant. «De sorte qu'on arrive à la neutralité budgétaire, relève Jacques Rassart, consultant spécialisé en la matière. Et obtenir un prix identique à la pompe pour le consommateur.» Pour inciter les distributeurs à intégrer ces carburants verts, l'État pourrait également envisager des pénalités sur le carburant sans adjonction de carburant bio, comme c'est déjà le cas en France. Ce qui rendrait le carburant traditionnel non concurrentiel.
3.000 emplois belges
Selon l'Institut pour un développement durable (IDD), le coût de cette défiscalisation oscillerait entre € 84 millions et € 197 millions. «Bien sûr, il n'y a pas de perte pour l'État, souligne Philippe Defeyt, économiste et membre de l'IDD. Mais il y a une forme de subside pour les biocarburants et, si l'on résonne comme un économiste, on peut se dire que cet argent aurait pu servir au soutien d'autres filières, peut-être plus bénéfiques encore pour l'environnement. Finalement, ces mesures sont prises pour que la filière soit viable et qu'en quelques années, les investissements consentis par les producteurs soient amortis.» Ces mesures soutiendraient aussi l'emploi : selon certaines sources, les biocarburants permettraient d'occuper, chez nous, jusque 3.000 personnes de manière directe et indirecte.
Pour l'instant, le secteur belge est en attente de la répartition des quotas de production bénéficiant de la défiscalisation. Elle doit être rendue officielle, par le gouvernement, au mois d'octobre. Date à laquelle chaque projet saura s'il peut espérer être rentable.
Source : Trends.be
Commentaires